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Actualités Recensions

Les vrais ennemis de l’Occident

Broché : 560 pages
Editeur : L’artilleur (26 octobre 2016)
Collection : TOUC.ESSAIS
Langue : Français
ISBN-10 : 2810007276
ISBN-13 : 978-2810007271
Dimensions : 14 x 4,5 x 22 cm

 Les vrais ennemis de l’Occident

Sous-titré Du rejet de la Russie à l’islamisation des sociétés ouvertes, le dernier livre d’Alexandre Del Valle vise à alerter une opinion occidentale assoupie des menaces que font peser sur la liberté les groupes affiliés au djihadisme international. Ces derniers sont très nombreux ; on en connaît les plus célèbres grâce aux crimes de masse qu’ils n’hésitent pas à perpétrer : Al-Qaïda, Front al-Nosra et ainsi de suite. Ces divers groupes constituent une internationale du terrorisme dont le but assumé et d’imposer sur terre l’ordre islamique avec, pour point d’appui principal, l’application stricte de la Charia. C’est sans compter sur les bailleurs de fonds de ces divers groupes que sont tous ces Etats avec lesquels les pays occidentaux continuent, comme si de rien n’était, à faire des affaires, Arabie saoudite et Qatar en tête. Disposant de pétrole et de gaz à profusion, ces derniers, quoique volontiers immergés dans la société de consommation, constituent ce que l’auteur appelle les grands pôles du totalitarisme islamiste. Le livre très fouillé d’A. Del Valle montre à quel point les ennemis de l’Occident sont déterminés. Entraînés par une logique folle, ils n’entendent laisser d’autre choix que la conversion ou la mort. Ici, ils se sentent appuyés par des coreligionnaires qui n’ont nulle envie de s’assimiler et pour qui les mots République ou laïcité ne signifient rien. Non content d’identifier clairement la menace, l’auteur tente, dans une dernière partie, de redonner espoir en proposant des pistes d’action. Ces dernières sont très diverses, allant d’un partenariat avec la Russie jusqu’au développement d’énergies alternatives susceptibles de nous affranchir de la dépendance saoudienne ou qatarie. Mais l’essentiel réside peut-être ailleurs : dans la capacité à faire aimer la France, pays d’accueil et terre riche d’un patrimoine séculaire. Un livre qui alerte et enrichit la réflexion.

 

Alexandre Del Valle, Les vrais ennemis de l’Occident, L’Artilleur, 2016, 549 pages, 23 €

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Actualités Recensions

Le crépuscule des idoles progressistes

Broché : 300 pages
Editeur : Stock (1 février 2017)
Collection : Essais – Documents
Langue : Français
ISBN-10 : 2234079810
ISBN-13 : 978-2234079816
Dimensions : 13,5 x 2 x 21,5 cm

 Le crépuscule des idoles progressistes

Décidément, la France aime les idées et les batailles d’idées. Il y a peu, les observateurs soulignaient la fin de la querelle gauche – droite au prétexte que les frontières idéologiques avaient cédé devant l’individualisme et la consommation. L’ouvrage de Bérénice Levet, confirmé par tant d’autres livres, d’articles et d’interviews, remet avec force les pendules à l’heure : non, le débat d’idées n’est pas mort. S’adaptant et se renouvelant au gré des fluctuations de la société, il reprend des couleurs. La meilleure preuve en est les élections présidentielles, les deux candidats épousant de près la doxa propre à leur camp, progressiste d’un côté, réactionnaire de l’autre. Mondialisation, culte du progrès, ouverture à l’autre, à gauche ; défense des identités, amour de la tradition, volonté de ne pas se faire submerger, à droite. Mais, comme le fait remarquer Bérénice Levet, les situations de départ n’étaient pas les mêmes, la gauche ayant, depuis 1945, préempté les fruits idéologiques d’un débat déserté pour partie par une droite enchevêtrée dans le marais de la Collaboration. Misant sur l’appauvrissement d’une pensée autrefois largement dominante, l’auteur alimente les ressorts des vieilles « passions françaises » (Theodor Zeldin). L’enracinement de l’homme, la transmission du passé, l’assignation d’un rôle majeur dévolu à l’école, le droit des peuples à la continuité historique, telles sont les idées fortes que porte Le crépuscule des idoles progressistes. Dans une société aussi atomisée que la nôtre, il vaut la peine de se pencher sur des questions dont, esprit partisan ou pas, tout citoyen sérieux ne saurait faire l’économie. Estimant que le progressisme « a programmé l’obsolescence de l’être occidental », B. Levet postule la venue d’un citoyen capable de s’enthousiasmer pour l’héritage civilisationnel dont il est porteur. En ces temps portés au nihilisme, un livre à considérer avec le plus vif intérêt.

 

Bérénice Levet, Le crépuscule des idoles progressistes, Stock, 2017, 265 pages, 19.50 €

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Recensions Religion

Allons aux faits

Broché : 256 pages
Editeur : Gallimard (3 octobre 2016)
Collection : HORS SERIE CONN
Langue : Français
ISBN-10 : 2072699363
ISBN-13 : 978-2072699368
Dimensions : 20,5 x 2,1 x 14 cm

 Allons aux faits

Pourquoi ce livre ? Régis Debray en donne la raison en 4ème de couverture : « En me donnant un micro pour deux séries d’interventions, l’une sur l’histoire, l’autre sur la religion, France Culture m’a permis de résumer et clarifier les travaux que je mène depuis maintes années sur diverses affaires temporelles et spirituelles. » Voilà pour le cadre. En effet, pour qui suit à peu près régulièrement Régis Debray, les sujets abordés dans Allons aux faits saisissent à frais nouveaux ses thèmes de prédilection : l’histoire du politique et de l’art, le sacré, la croyance, Dieu, la religion, etc. Soit une douzaine de chapitres dans lesquels l’auteur de Jeunesse du sacré n’hésite pas à renverser les perspectives, à bousculer des schémas que l’on croyait fermement assurés. Avec Régis Debray, et c’est son intérêt essentiel nous semble-t-il, tout est mouvant, tout prête à discussion, rien n’est figé. Il faut ici citer le sous-titre, qui est tout un programme et qui révèle la tournure d’esprit d’un intellectuel de haute volée toujours prêt à ébranler les fondations, à gratter le vernis afin de mieux voir l’essence des choses : « Croyances historiques, réalités religieuses ». Pour R. Debray, ce n’est pas un oxymore ou alors c’en est bien un, mais qui ouvre sur une réalité multiple et diffuse. Regardez, dit-il, combien les croyances sont essentielles pour l’histoire ; il n’est qu’à voir l’histoire de l’empereur Constantin par qui le christianisme a gagné le droit de citer au sein de l’Empire romain. Quant à la religion – qui n’est pas à confondre avec la foi ou la croyance -, elle est une réalité plus solidement ancrée que ne le croit l’occidental, lui qui a rompu avec le monde de la tradition. Feu d’artifices intellectuel, Allons aux faits constitue une excellente analyse d’une époque durant laquelle, selon l’expression du philosophe Zygmunt Bauman, tout devient liquide.

 

Régis Debray, Allons aux faits, Gallimard, 2016, 254 pages, 18€

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Histoire Recensions

Une histoire du Brésil

Broché : 480 pages
Editeur : Perrin (25 février 2016)v Langue : Français
ISBN-10 : 2262037507
ISBN-13 : 978-2262037505
Dimensions : 15,5 x 3,6 x 24 cm

 Une histoire du Brésil

Qu’il est bon de temps à autre de porter son regard au-delà des frontières de l’Europe, de s’intéresser à une histoire qui n’est pas la nôtre. Par conséquent, autant dire que cette histoire du Brésil est la bienvenue. Attention au titre ! Il s’agit d’Une histoire du Brésil, et non de l’histoire du Brésil. L’auteur, Michel Faure, a pris une option : considérer l’histoire cet immense pays sous un angle essentiellement politique. On ne lira pas cette histoire sans avoir cette précision à l’esprit. Peu de choses sur l’évolution économique et sociale, sur la place de la religion ou sur la vie culturelle, mais le panorama circonstancié et détaillé de l’évolution chaotique de régimes successifs, de la Vieille République aux tempêtes successives essuyées par l’actuelle présidence de Dilma Roussef, en passant bien sûr par l’Ordo Novo de Vargas. Le tableau dressé par Michel Faure laisse une impression assez curieuse. Il est tout de même étonnant qu’un pays aussi grand, disposant d’atouts aussi nombreux, ait du mal à devenir la grande puissance bénéficiaire des bienfaits dont l’a pourvues la nature. L’auteur décrit un certain nombre de points très positifs, le premier étant l’implantation de la démocratie en dépit d’une opposition puissante. En dépit de difficultés très sérieuses (inégalités sociales et économiques colossales, problèmes écologiques, criminalité galopante, insuffisance des structures…), le Brésil semble avoir plutôt bien négocié son entrée dans le XXI° siècle. Si certains, ici, considèrent avec horreur le mélange des populations propres au Brésil, au point d’avoir inventé un néologisme : la brésilianisation, l’important c’est le regard que portent les natifs sur leur patrie : une force encore indolente, géant endormi qui doit encore se débarrasser de ses pieds d’argile pour asseoir toute sa puissance.

 

Michel Faure, Une histoire du Brésil, Perrin, 2016, 441 pages, 24.90€

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Actualités Recensions

Notre ennemi, le capital

Broché : 320 pages
Editeur : FLAMMARION (11 janvier 2017)
Collection : CLIMATS NON FIC
Langue : Français
ISBN-10 : 2081395606
ISBN-13 : 978-2081395602
Dimensions : 21 x 2 x 13,7 cm

 Notre ennemi, le capital

En dépit de tous les défauts qu’on lui connaît, on ne voit pas ce qui pourrait, non pas mettre fin, mais au moins atténuer l’impérialisme du système capitaliste. Comme le rappelle la phrase du philosophe slovène Slavoj Zizek figurant sur la jaquette du livre de Jean-Claude Michéa : « Il est aujourd’hui plus facile d’imaginer la fin du monde que celle du capitalisme. » Intellectuel de gauche, enrageant devant les reculades incessantes des gouvernements de gauche face aux dégâts de la mondialisation libérale, Jean-Claude Michéa ne cesse de rompre des lances avec le capitalisme d’aujourd’hui, ce capitalisme financier, prédateur et glouton, celui qui violente l’identité des peuples et leurs traditions. Au départ, il s’agissait pour l’auteur de répondre à des questions qui lui avaient été posées par un site internet tenant pour la décroissance. A la manière des rares auteurs qui ajoutent plus de pages dans les notes que dans le corps principal du texte, l’auteur a ajouté à ses réponses ce qu’il appelle des scolies, notes servant à aller plus loin. Notre ennemi, le capital dit l’ensemble des raisons qui poussent Jean-Claude Michéa à détester le système capitaliste. Ce faisant, il réhabilite des penseurs qui, depuis quelques décennies, avaient été tenus pour quantité négligeable : les socialistes utopistes français et Marx en particulier. Mais, en définitive, ce qui apparaît, c’est la conjonction intellectuelle qui unit un homme de gauche comme Michéa à un intellectuel de droite comme Alain de Benoist, tous deux partisans d’un retour aux limites et à la raison. Une union plus utile que jamais face à celle qui rassemble, comme le rappelait il y a peu Jacques Julliard, les fidèles « les pages saumon du Figaro et les pages arc-en-ciel de Libération. »

Jean-Claude Michéa, Notre ennemi, le capital, Flammarion, 2017, 316 pages, 19€

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Plus rien à faire, plus rien à foutre

Broché : 198 pages
Editeur : Robert Laffont (23 février 2017)
Langue : Français
ISBN-10 : 2221198662
ISBN-13 : 978-2221198667
Dimensions : 13,6 x 1,8 x 21,6 cm

  » Plus rien à faire, plus rien à foutre  »

Pour simplifier et sacrifier aux besoins de sa démonstration, Brice Teinturier, directeur de l’Institut Ipsos, a choisi de nommer « PRAFistes » ainsi tous ces Français qui, au mieux sont devenus totalement indifférents à la vie politique ou, au pire, hésitent entre résignation et colère. Ce que l’auteur appelle de l’appellation un peu obscure de « PRAF attitude » est constituée par une force qui monte inexorablement au sein du corps électoral : ces citoyens dégoûtés par la droite et la gauche mais qui ne sont pas prêts à rejoindre les rangs du Front National et qui expriment un sentiment de rejet profond à l’égard de l’ensemble de la classe politique. Plutôt que de s’arrêter à ce titre racoleur, mieux vaut insister sur le sous-titre : « La vraie crise de la démocratie ». Alors que le peuple français s’apprête à élire le prochain Président de la République puis de nouveaux députés, comment ne pas être effaré devant cette dissidence larvée de plusieurs millions d’électeur que Brice Teinturier place en toile de fond ? Dans une première partie, l’auteur passe en revue ce qu’il appelle les racines du mal : les mutations d’une information qui fait du sensationnel un principe de base, le manque de résultats des politiques publiques, le rejet d’une fiscalité qui frappe de plein fouet les classes moyennes, une classe politique manquant singulièrement de vision. Le diagnostic dressé par l’auteur est imparable ; nous vivons dans une « société d’exaspération où l’exigence de liberté individuelle prévaut de plus en plus ouvertement sur le souci de l’intérêt général. » (p. 179) Pour lutter contre l’attitude désabusée de ceux qui « n’en ont plus rien à faire », on pourrait compter sur divers leviers. Des politologues travaillent sur une autre forme de démocratie, tantôt l’une donnant un rôle premier aux experts, tantôt une autre faisant des citoyens des leviers d’action susceptibles d’adopter ou de défaire la loi, etc. Comme on l’entend parfois, une autre façon de faire de la politique est possible, mais le temps presse.

 

Brice Teinturier, « Plus rien à faire, plus rien à foutre », Robert Laffont, 2017, 198 pages, 18€

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Histoire Recensions

France 1940 : Défendre la République

Broché : 320 pages
Editeur : Perrin (16 mars 2017)
Langue : Français
ISBN-10 : 2262065608
ISBN-13 : 978-2262065607
Dimensions : 15,5 x 2 x 21,5 cm

 France 1940 : Défendre la République

Dès l’introduction, l’auteur donne le ton. Plutôt que de livrer une énième histoire de la catastrophe des mois de mai et juin 1940, Philip Nord a préféré « suggérer une approche sans intransigeance, nuancée, de la défaite française ». Il faut insister : là où d’autres auteurs comme Jacques Benoist-Méchin ou Alistair Horne décrivent par le menu le détail des opérations militaires et les affres des dirigeants politiques, abasourdis devant l’ampleur de la déroute, Philip Nord a préféré  considérer les événements de haut. Cette vision surplombante a le mérite de dégager des lignes de faîte qu’on a certainement eu tort de négliger. La thèse de l’universitaire américain se résume en quelques phrases : la France était bien seule dans son combat contre la puissance militaire germanique, les politiciens de la III° République avaient plutôt bien préparé l’outil militaire et la débâcle n’était pas inévitable. En un mot, le régime n’était pas aussi pourri que certains, par esprit de revanche ou de haine à l’égard de la république, ont voulu le dire. Certes, nombreuses furent les défaillances mais elles ne sauraient expliquer à elle seule la catastrophe qui s’abattit sur le pays. Pour l’auteur, en dépit de ses faiblesses et dans la mesure où la France constituait la première ligne des nations démocratiques contre l’ennemi commun, elle s’est comportée de façon très honorable. Ce qui a abattu le régime est plutôt à chercher du côté des ennemis du régime républicain, ces partisans d’un régime autoritaire qui, à l’instar de Pétain, assimilaient la République à la chienlit. C’est cette contestation interne, ce manque de confiance à l’égard des institutions, cette défiance de l’avenir qui a contribué, presque aussi sûrement que les blindés de la Whermacht, à liquider le régime et à abattre le pays. En quelques courts chapitres, Philip Nord renouvelle la compréhension d’événements qui ont marqué durablement la société française.

 

Philip Nord, France 1940. Défendre la République, Perrin, 2017, 232 pages, 19.90€

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Churchill, stratège passionné

Broché : 280 pages
Editeur : Perrin (24 novembre 2016)
Collection : MTRE DE GUERRE
Langue : Français
ISBN-10 : 2262050473
ISBN-13 : 978-2262050474
Dimensions : 16,3 x 3,3 x 21 cm

 Churchill, stratège passionné

L’excellente collection « Maître de guerre » délaisse les militaires pour s’intéresser aux politiques. Il faut dire qu’il ne s’agit pas de n’importe quel homme politique et que celui auquel s’intéresse François Kersaudy est un être ô combien singulier. Tout, dans l’itinéraire de Winston Churchill, s’est déroulé sous le signe de l’exception. Collégien peu doué, ce descendant du grand Malborough s’intéresse tôt à la chose militaire. Aventurier et indiscipliné, il est cavalier en Inde. Quittant l’armée, le voilà reporter de guerre en Afrique du Sud durant la Guerre des Boers. Député et ministre alors qu’il a tout juste trente ans, il est Premier Lord de l’Amirauté à la déclaration de la guerre de 14-18. La suite, on la connaît… surtout ces épisodes où, tenant tête à l’Allemagne hitlérienne, il promet au peuple anglais du sang, de la sueur et des larmes. Tout au long de ce récit vivant, agrémenté de cartes et d’images toujours très significatives, François Kersaudy livre l’image d’un excentrique bon vivant, passionné par l’armée, joueur, plein d’idées, tantôt excellentes, parfois saugrenues. Doté d’une prescience extraordinaire et d’un sens de la formule faisant souvent mouche, W. Churchill connut aussi quelques ratés majeurs dus à une imagination débridée l’amenant à jouer gros sans avoir beaucoup d’atouts dans son jeu. Ce Churchill montre les multiples facettes d’un personnage dont on se demande si, par ses multiples activités, il n’a pas eu plusieurs vies. Et puis, cerise sur le gâteau, impossible de s’ennuyer en compagnie de cet amoureux du whisky soda, francophile et amateur de bons mots. On se souvient par exemple de l’exclamation qu’il poussa quand il apprit l’obtention du Prix Nobel de littérature : « Je ne savais pas que j’écrivais si bien. » F. Kersaudy dresse le portrait vivant d’un homme sacrément attachant.

 

François Kersaudy, Churchill, stratège passionné, Perrin, 2017, 443 pages, 24€

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Les hommes de Vichy

Broché : 350 pages
Editeur : Perrin (19 janvier 2017)
Langue : Français
ISBN-10 : 2262049297
ISBN-13 : 978-2262049294
Dimensions : 15,5 x 3 x 24 cm

 Les hommes de Vichy

En spécialiste de la France des années 40, Jean-Paul Cointet a eu l’heureuse idée de synthétiser en un volume l’essentiel des informations essentielles à la connaissance des hommes qui ont entouré Pétain de 1940 à 1944, date de l’exil forcé à Sigmaringen. Bien qu’étant courts, la bonne vingtaine de portraits ici présentés donne l’essentiel des biographies d’hommes qui, tous, à des degrés divers, ont eu des comptes à rendre à la Libération. A côté des figures connues qu’étaient Laval ou de Brinon, l’auteur a tenu à présenter des hommes qui, bien qu’ayant davantage agi dans l’ombre, ont pu influencer la politique de l’Etat français. Jean Bichelonne  ou Paul Marion n’étaient pas les seconds couteaux qu’on imagine : eux aussi ont eu leur part d’influence.  Ces « hommes de Vichy » apparaissent dans un ordre qui a sa logique propre. Il y avait les fondateurs comme Weygand et Darlan, puis les conseillers du Prince, à l’image de Du Moulin de Labarthète. A côté des doctrinaires à la façon de Vallat et de Massis il fallait compter sur les  épurateurs comme Darnand. Néanmoins, ce qui frappe le plus dans cette galerie, c’est l’hétérogénéité des parcours et des profils, ce que l’auteur explique en préface (p. 13) : « Etudier les hommes de Vichy est une manière de mettre fin à une approche  voyant dans ce régime un bloc, dans l’espace comme dans le temps. » En effet, il est rigoureusement impossible de dresser le portrait-type du collaborateur du maréchal Pétain. Ce dernier est comme l’icône qui unifie tout ce petit monde qui n’échappait pas, dans l’atmosphère étroite et confiné de la ville-préfecture de l’Allier, aux mesquineries et jalousies propres à tous les paniers de crabes. Beaucoup viennent de vieilles familles catholiques et n’ont d’autre souci que de régénérer un pays qu’ils estiment décadent. Il y a aussi les arrivistes, puis ceux qui se persuadent de la victoire de l’Allemagne et veulent arrimer le char de l’Etat au Reich. Si ces portraits laissent apparaître de temps à autre un peu de brillance, on ne peut qu’être frappé, au final, par la médiocrité d’un personnel politique qui, somme toute, avait les toutes les apparences de celui de la défunte III° République.

 

Jean-Paul Cointet, Les hommes de Vichy, Perrin, 2017, 375 pages, 23.90€

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Comment tout peut s’effondrer

Broché : 304 pages
Editeur : Le Seuil (9 avril 2015)
Collection : Anthropocène
Langue : Français
ISBN-10 : 2021223310
ISBN-13 : 978-2021223316
Dimensions : 14,1 x 1,7 x 19,1 cm

 Comment tout peut s’effondrer

Et si notre civilisation était au bout du rouleau, en phase de liquidation à force d’avoir brûlé en quelques décennies l’essentiel de son carburant ! Telle est l’hypothèse que Pablo Servigne et Raphaël Stevens développent dans ce livre passionnant. Dans les premiers chapitres, ils utilisent l’image d’une humanité ressemblant à un bolide à la direction faussée et qui foncerait à vitesse accélérée en direction d’un gouffre. Il faut dire que les chiffres qu’ils énoncent – qu’ils proviennent du GIEC ou d’organismes privés – font froid dans le dos. Nous consommons la plupart de nos ressources à des vitesses record et nous en voulons toujours plus. La vogue du progrès à outrance de la consommation folle ne sont tout simplement plus de mise dans le cadre du monde fini qu’est le nôtre. Le problème, c’est que les élites politiques et économiques font de la croissance l’horizon indépassable de l’humanité et que tous nous préférons nous plonger la tête dans le sable et profiter des plaisirs de la vie, dussent-ils coûter cher en calories ou en kilowatts. Nous savons, par exemple, que l’exploitation effrénée du pétrole de schiste est catastrophique pour l’environnement, que d’ici quelques décennies le seul pétrole exploitable coûtera un prix prohibitif ; pourtant, nous continuons à organiser des courses de bagnoles, source de pollution sonore et atmosphérique. Si les auteurs de Comment… s’avouent catastrophistes, ils demeurent cependant d’un optimisme raisonnable. Notre civilisation court inéluctablement à sa perte. Ce sera la fin d’un monde mais non pas la fin du monde. Il faut compter sur la capacité de résilience de l’espèce humaine, sur des valeurs telles que la générosité et la solidarité pour bâtir un autre monde. Un monde où le bonheur ne reposera pas sur l’accumulation des biens et la recherche illusoire d’un mythe appelé progrès. Après l’effondrement, il y aura un avenir à penser et à vivre.

 

Pablo Servigne & Raphaël Stevens, Comment tout peut s’effondrer, Le Seuil, 2015, 296 pages, 19€