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Mémoires Recensions

Et dans l’éternité je ne m’ennuierai pas

Broché : 272 pages
Editeur : ALBIN MICHEL (27 août 2014)
Collection : ESSAIS DOC.
Langue : Français
ISBN-10 : 2226256881
ISBN-13 : 978-2226256881
Dimensions : 22,5 x 2 x 14,5 cm

 Et dans l’éternité je ne m’ennuierai pas

A l’âge de 84 ans, il n’était pas étonnant que Paul Veyne, l’un de nos plus grands spécialistes de l’Antiquité romaine, songe à livrer ses mémoires. D’emblée, une petite déception. On pouvait en effet s’attendre à un livre plus exhaustif et plus bavard de la part d’un de nos plus grands historiens, qu’il racontât par exemple la genèse et le travail qui ont accompagné ses principales œuvres. Or, Paul Veyne a choisi de raconter l’homme qu’il était et qu’il demeure ; il a refusé de se révéler en historien prenant la pose à l’ombre d’une œuvre considérable tant par son ampleur que par son originalité (N’est-il pas l’un des premiers à avoir dépoussiérer l’image des gladiateurs, « des hommes libres, passionnés par leur métier et la violence » – page 70). La trame chronologique choisie par notre auteur s’efface peu à peu au profit de ses appétences et de ce qu’il juge ou jugeait « intéressant » : l’Italie, dont il est tombé amoureux fou du catalogue artistique (voir son Musée imaginaire paru chez Albin Michel), l’alpinisme, la Rome antique… Il s’attarde plus sur son adhésion au Parti communiste qu’à sa période de formation à Normale Sup. En fin de compte, Paul Veyne a été militant au PCF comme il était dans la vie : une sorte de grand adolescent voyant généralement les choses à distance, peu convaincu et pas du tout servile… La fin du livre se clôt sur les drames qui l’ont touché de près, comme le suicide de son fils. Mais, peut-être inspiré par les philosophes antiques, il évite regrets et remords pour mieux se souvenir des moments heureux.

La religion enfin. En disant son regret de ne pas être croyant, Paul Veyne fait cependant montre d’un certain sens religieux. Il dit par exemple son affection pour sainte Thérèse d’Avila, son attachement à l’Evangile de Jean, mais refuse d’adhérer au dogme et à l’éthique catholiques. Le rebutent divers articles du Catéchisme de l’Eglise catholique. Il y a du Lucien Jerphagnon chez Paul Veyne : l’attrait pour la philosophie antique païenne va de pair avec une inclination certaine pour le message du Christ et à une attention convaincue à l’égard de la religion chrétienne, vue comme une « ensorceleuse que n’égale aucune autre religion au monde ».

 

Paul Veyne, Et dans l’éternité je ne m’ennuierai pas, Albin Michel, 2014, 260 pages, 19.50 €

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Recensions Témoignages

L’Oural en plein cœur : Des steppes à la taïga sibérienne

Broché: 250 pages
Editeur : ALBIN MICHEL (30 avril 2014)
Collection : ESSAIS DOC.
Langue : Français
ISBN-10: 2226256814
ISBN-13: 978-2226256812
Dimensions : 20,4 x 13,8 x 2,2 cm

 L’Oural en plein cœur

En septembre, chacun se fait plaisir en racontant à ses collègues de travail le ou les voyages qu’il a effectués durant la période estivale : « J’ai fait l’Italie », dit l’un ; « moi le Maroc » répond son voisin, et ainsi de suite. Ce genre d’activités de masse, planifié et encadré, ces soi-disant voyages sont-ils encore du voyage ? Ils en ont l’apparence, mais ne sont au final que des ersatz mal fagotés. Astrid Wendlandt fait partie des vrais voyageurs, aventuriers prêts à plaquer le confort quotidien pour se risquer à l’imprévu et au dépaysement total et soudain. Journaliste « globe-trotteuse », amoureuse d’un Russe qui l’avait jadis éconduite, elle a décidé de risquer le tout pour le tout et de le rejoindre. Problème : ce Russe n’habite pas à Moscou ou Saint-Péterbourg, villes cosmopolites qui font maintenant partie des lieux habituels de visite, mais dans l’Oural, à quelques encablures de la capitale, ce qui, à l’échelle de ce pays-continent, représente tout de même un bon millier de kilomètres. L’Oural, le dernier balcon avant l’immensité sibérienne, un des derniers refuges vierges où des milliers de kilomètres carrés n’ont jamais vu présence humaine. Avec L’Oural en plein cœur, on est certes loin du dépaysement décrit par le marquis de Custine avec sa Russie en 1839 ou de la truculence de Sylvain Tesson, auteur d’un superbe récit : Dans les forêts de Sibérie. Il n’empêche ! Avec une sorte de fausse candeur, Astrid Wendlandt nous gratifie d’un beau carnet de voyage dans une région aussi sauvage qu’attachante, à mi-chemin entre la modernité moscovite et le dénuement des immensités désolées de la Sibérie. Dans ces vastes contrées aux contours improbables, l’auteur raconte de bien étonnantes rencontres, comme celle d’une communauté ayant rompu avec la civilisation. A Alexandrovka se sont réunis celles et ceux qui « ont fait un pied de nez à la civilisation pour s’en créer une nouvelle. » Comment, à travers les rencontres et les liens noués, dans la description des paysages, le lecteur ne se sentirait-il pas happé par ce sentiment propre à la Russie : la démesure… ? Démesure des habitants et des lieux, c’est cela l’Oural et la Russie en plein cœur !

 

Astrid Wendlandt, L’Oural en plein cœur, Albin Michel, 2014, 216 pages, 19.50 €

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Littérature Recensions

Réenchanter la science

Broché: 450 pages
Editeur : ALBIN MICHEL (28 août 2013)
Collection : ESSAIS DOC.
Langue : Français
ISBN-10: 2226245456
ISBN-13: 978-2226245458
Dimensions : 23,8 x 15,4 x 3,4 cm

 Réenchanter la science

En conclusion de son livre Notre existence a-t-elle un sens ?, l’historien des sciences Jean Staune écrivait que désormais les matérialistes avaient du souci à se faire. En effet, beaucoup de leurs positions, à force d’être rabotées depuis quelques décennies, deviennent intenables. En dix chapitres fort lisibles par les néophytes, Rupert Sheldrake démonte la majorité des éléments sur lesquels s’établit la science mécaniste. L’établissement de celle-ci, au XIX° siècle, n’est plus qu’un lointain souvenir. L’avènement de la physique quantique et l’idée qu’il existe un autre niveau de réalité, non perceptible à nos sens, fait de plus en plus de chemin, au grand dam des matérialistes qui, pour s’y opposer, n’ont d’autre choix que la dénégation. Entre ces deux conceptions de la science, le débat est devenu difficile tant les tenants du matérialisme sont dogmatiques. Si vous leur dites : « prodige », « inexpliqué » ou « télépathie », ils répondent aussi sec : « charlatanisme », « illusion » et « tromperie ». Pour R. Sheldrake, un tel comportement, fermé à tout ce qui n’est pas rationnellement expliqué ressort du dogmatisme le plus obtus.

En dix points, l’auteur, scientifique de son état, met à mal les croyances les plus fermes des matérialistes. Il tente de prendre ces derniers au mot en leur mettant les yeux devant dix défis. S’ils le peuvent, qu’ils démontrent par exemple l’immuabilité des lois de la nature ! Qu’ils donnent la preuve que la mémoire est stockée dans une partie précise du cerveau ou que la médecine mécanique contemporaine est la seule efficace ! Il faut lire Sheldrake pour se rendre compte à quel point de tels arguments ont du poids. Ses demandes insistantes pour l’émergence d’un débat fécond entre scientifiques sont plus que jamais à prendre en considération. Cette discussion doit être ouverte aux familles philosophiques et religieuses.

Alors que les découvertes scientifiques connaissent une stagnation, l’auteur s’interroge. Pour lui, pas de doute, il faut s’aventurer « hors des sentiers battus de la recherche conventionnelle », se poser enfin les questions interdites depuis trop longtemps. Passionnant de bout en bout, Réenchanter la science y incite fortement.

 

Rupert Sheldrake, Réenchanter la science, Albin Michel, 2013, 424 pages, 24 €

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Actualités Recensions

Lettres béninoises

Broché: 185 pages
Editeur : ALBIN MICHEL (22 janvier 2014)
Collection : ESSAIS DOC.
Langue : Français
ISBN-10: 2226254692
ISBN-13: 978-2226254696
Dimensions : 20,4 x 14 x 2 cm

 Lettres béninoises

Rien n’est plus hasardeux que de décrire le futur. Beaucoup s’y sont risqués avec des fortunes diverses. L’économiste Nicolas Baverez se livre lui aussi à l’exercice. L’action de ses Lettres béninoises se situe en 2040. Alassane Bono, béninois, nouveau directeur du Fonds Monétaire International, débarque en France pour tâcher de remettre sur les rails un pays en totale déshérence. Dans les lettres qu’il envoie à sa famille et ses amis, il décrit l’état de décrépitude d’une France rongée par la dette, la désindustrialisation, la misère, l’abandon des institutions, le communautarisme. Disons-le, le tableau que dresse Nicolas Baverez de la France de demain a quelque chose d’apocalyptique. Ayant passé du 5ème au 25ème rang dans le monde pour la richesse et la puissance, la France est un pays en pleine déliquescence. Cette dégradation spectaculaire est d’abord le fruit d’un déni de réalité de la part des élites. Economie en faillite, dette colossale, abandon de l’euro, classe politique incapable, paupérisation, multiplication des zones de non-droit, etc. Tout y est et tout y passe ! Face à une Afrique qui redresse la tête et à la multiplication des puissances émergentes, l’Europe passe pour un continent anesthésié, seule l’Allemagne, comme toujours, arrivant à tirer son épingle du jeu. C’est n’est pas que les Français de 2040 manquent de ressort. Au contraire, Nicolas Baverez – alias Alassane Bono – voit du réconfort à la vue de ces entrepreneurs et de quelques politiques qui ne se résignent pas à la fatalité. Le problème, au fond, réside dans un Etat aussi obèse qu’impuissant, aveugle au cours du temps car ayant été incapable de mener les réformes nécessaires. D’un pessimisme noir, l’auteur n’en fini pas de décrire cette France qui tombe, titre d’un essai précédent. « Les Français ont ruiné l’Etat, fait-il écrire à son héros, en s’installant dans l’illusion que chacun, sans travailler, pouvait vivre à crédit aux dépens de son voisin. » (p. 35).

D’aucuns trouveront le tableau dressé par Nicolas Baverez trop noir. Sans doute y a-t-il une part d’exagération dans cette peinture d’une France pauvre et déclassée. Il n’empêche : les grandes tendances sont déjà et les problèmes que décrit l’auteur sont ceux que lui-même ou un Alain Peyrefitte décrivait il y a déjà trente ans. Trop de dénis, de réformes bâclées ou empêchées donnent du grain à moudre à l’auteur de ces Lettres béninoises.

 

 Nicolas Baverez, Lettres béninoises, Albin Michel, 2014, 186 pages, 14,25 €

 

 

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Actualités Recensions

Pourquoi les riches ont gagné

Broché: 153 pages
Editeur : ALBIN MICHEL (8 janvier 2014)
Collection : ESSAIS DOC.
Langue : Français
ISBN-10: 2226254706
ISBN-13: 978-2226254702
Dimensions : 22,4 x 14,4 x 2 cm

 Pourquoi les riches ont gagné

Le livre de Jean-Louis Servan-Schreiber n’est pas le premier à s’ouvrir sur cette parole de Warren Buffett, la deuxième fortune des Etats-Unis : « La guerre des classes existe toujours, mais c’est nous, les riches, qui la menons. Et nous la gagnons. » De fait, jamais les riches n’ont été aussi nombreux. En France, est considéré comme riche celui dont les revenus dépassent 4 500 euros mensuels ; c’est dire si l’écart est considérable entre un salarié qui gagne bien sa vie, et qui est donc considéré comme riche si l’on tient compte des mesures de l’INSEE, mais qui est bien loin d’atteindre les 20 milliards de patrimoine de Bernard Arnault. La richesse est protéiforme, multiforme ; elle tient au talent (entrepreneurs, artistes…) comme à l’héritage. Pourquoi, à l’échelle du monde, la multiplication des riches ? Tout simplement parce que « des décennies de croissance à l’échelle internationale ont empilé de telles masses d’argent qu’il en découle une prolifération des riches » (p. 39). Après quelques chapitres sur les soucis, besoins et caprices des riches, suit en fin de livre le chapitre-phare, les pages qui expliquent les raisons du succès des riches (parce qu’ils sont devenus de puissants acteurs sociaux, qu’ils sont experts en stratégie fiscale planétaire, qu’ils possèdent le pouvoir d’informer, etc.) A en croire l’auteur, les riches ont de quoi être tranquilles très longtemps. En effet, ils ont gagné la guerre des classes en devenant un modèle envié. Certes on peut les jalouser mais leur ostentation médiatique ne joue pas l’effet repoussoir que l’on croit. Enfin – cerise sur le gâteau ! – « tout se passe comme si les riches avaient gagné, financièrement bien sûr, mais aussi politiquement et presque idéologiquement ». (p. 20) On pourrait se consoler en pensant que, logiquement et mathématiquement, l’élévation du nombre de riches entraîne l’arrachement à la pauvreté des plus petits, ce qui est vrai. En revanche, ce qui peut sembler désespérant, c’est le fait que la lutte contre les inégalités – – qui n’ont jamais été aussi élevées – semble complètement obsolète ; elle ne semble plus intéresser grand monde. Pour les acteurs politiques, ce n’est pas la réduction des inégalités qui est première, c’est la création d’emplois. Tout en concevant bien ce changement, Jean-Louis Servan-Schreiber indique que la situation actuelle est destinée à durer : quand on est riche, il y a tout lieu de croire que c’est pour longtemps. Et tant pis pour les pauvres !   Jean-Louis Servan-Schreiber, Pourquoi les riches ont gagné, Albin Michel, 2014, 154 pages, 14.50 €

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Recensions Témoignages

Vies ordinaires en Corée du Nord

Broché: 326 pages
Editeur : Editions Albin Michel (10 novembre 2010)
Collection : ESSAIS DOC.
Langue : Français
ISBN-10: 2226217398
ISBN-13: 978-2226217394
Dimensions : 3 x 14,3 x 21,8 cm

 Vies ordinaires en Corée du Nord

Correspondante du Los Angeles Time en Corée du Sud, Barbara Demick connaît suffisamment la vie quotidienne en Corée du Nord pour y consacrer un ouvrage. Non pas qu’elle y ait fréquemment séjourné, mais elle a eu l’opportunité de rencontrer des transfuges, des Coréens du Nord qui n’en pouvaient plus du totalitarisme imposé par la dynastie initiée par Kim Il Sung. Aujourd’hui ces anciens réfugiés sont installés en Corée du Sud, heureux d’être libres tout en culpabilisant d’avoir laissé derrière eux des familiers et amis qui n’ont pas eu leur chance. Les informations relatives à la Corée du Nord sont très parcellaires tant le pays vit dans une opacité totale. Il n’existe pas d’endroit où la surveillance de la population est ainsi érigée en système de gouvernement. Dans ce régime policier où les mouchards sont nombreux et la propagande omniprésente, gare à celui qui prétendrait s’affranchir des directives du « Grand Leader », dictateur, chef de l’Etat et du Parti, généralissime, détenteur d’un pouvoir prétendu omnipotent et omniscient. A l’instar des anciens pays du Bloc communiste, il se trouve que la Corée du Nord vit dans un état chronique de pénurie. Des infrastructures antédiluviennes peinent à faire tourner des usines à bout de souffle. Avec une économie anémiée, le moindre dérèglement climatique peut générer une catastrophe. C’est ce qui s’est passé à la fin des années 1990 où des famines sévères ont touché de plein fouet un pays déjà moribond. Un à deux millions de victimes, dues autant à l’imprévoyance du régime qu’aux aléas climatiques. Pour beaucoup la coupe était pleine qui, tentant le tout pour le tout, passèrent en Chine pour rejoindre la liberté.

Parmi les quelques photos du livre, il en est une particulièrement saisissante : les deux Corées photographiées de nuit par un satellite. Alors que la Corée du sud scintille de mille feux, à l’instar de l’Europe occidentale ou du Japon, la Corée du Nord est plongée dans un noir absolu. C’est que dans ce pays de misère l’électricité est rationnée à quelques heures par jour. A la clarté d’une faible ampoule de 40 watts, les malheureux Coréens du Nord ont tout loisir pour ruminer sur l’état de privation dans lequel les a plongés un régime criminel. Le livre de B. Demick est une plongée dans la plus criminelle des absurdités.

 

Barbara Demick, Vies ordinaires en Corée du Nord, Albin Michel, 2010, 327 pages, 23.30 €

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Recensions Religion

Anticatéchisme pour le christianisme à venir

Broché: 250 pages
Editeur : ALBIN MICHEL (2 septembre 2013)
Collection : SPIRITUALITE
Langue : Français
ISBN-10: 2226249540
ISBN-13: 978-2226249548
Dimensions : 22,4 x 14,8 x 2,4 cm

 Anticatéchisme pour le christianisme à venir

En revisitant cent un fondamentaux de la foi chrétienne, Christine Pedotti – alias Pietro de Paoli – entend d’abord se montrer pédagogue. L’utilisation de mots courants, d’un style simple et d’un ton positif est mise au service d’un livre soucieux de conformer le vocabulaire et les concepts de la foi catholique avec le langage qui sied aux contemporains. Entendons-nous bien, il ne s’agit pas ici de faire l’iconoclaste. Christine Pedotti entend demeurer fidèle à la foi de l’Eglise ; elle désire simplement contribuer à dépoussiérer un vocabulaire qui rencontre la plupart du temps un écho médiocre. Parler ici d’anticatéchisme paraît ambigu et ceux qui y chercheront quelque brûlot de la part d’une des fondatrices du Comité de la Jupe en seront pour leur frais. Ce que l’auteur dit par exemple de la tradition est éclairant. Moyen de lutter contre le fondamentalisme, la tradition est un concept dynamique, ce que soulignait en son temps feu le cardinal Congar, « canal par lequel la Révélation ne cesse de se déployer » (p. 236).

Cent un articles ! On est loin de la masse que représente le Catéchisme de l’Eglise catholique. Pour l’auteur, l’important n’est pas dans un exposé organique de la foi catholique. Il s’agit de revisiter des mots essentiels de la foi afin de les rendre compréhensibles et acceptables pour nos contemporains. Parmi ces derniers, tellement sont loin de la foi que l’essai de C. Pedotti paraît un moyen judicieux de rendre l’Eglise et sa foi plus proches. Beaucoup de remarques pertinentes (cf. articles « miracle » ou « œcuménisme ») achèvent de convaincre de la pertinence de l’ouvrage.

Piero de Paoli, Anticatéchisme pour le christianisme à venir, Albin Michel, 2013, 254 pages, 18 €

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Histoire Recensions

La montagne refuge : Accueil et sauvetage des juifs autour du Chambon-sur Lignon

Broché: 400 pages
Editeur : ALBIN MICHEL (17 avril 2013)
Collection : ESSAIS DOC.
Langue : Français
ISBN-10: 2226245472
ISBN-13: 978-2226245472
Dimensions : 24,2 x 17,4 x 3,2 cm

 La montagne refuge : Accueil et sauvetage des juifs autour du Chambon-sur Lignon

L’accueil et le sauvetage des juifs autour de la commune du Chambon-du-Lignon constituent une aventure de mieux en mieux connue. Cet ouvrage se montre digne de l’intérêt suscité par cette petite communauté rurale qui n’a pas voulu se rendre à l’inacceptable, à savoir ne rien faire pour protéger des juifs persécutés. La Montagne refuge met une sourdine aux propos tendant à faire des Français de cette époque des collabos en puissance. Cet ouvrage collectif montre les risques pris par certaines communautés pour accueillir et défendre des juifs de France. Donnant tour à tour la parole à des historiens locaux et professionnels, La Montagne refuge se situe toujours à hauteur d’hommes, ce qui lui donne un reflet particulier. Ne risquent-ils pas de finir dans un camp de la mort ces enfants que l’on voit courir et jouer dans des photos couleur sépia, ces femmes et ces hommes qui connaissent le prix à payer en cas de capture ? La région du Chambon-sur-Lignon était-elle prédestinée à un tel sauvetage ? C’est très probable quand on connaît son histoire, elle qui fut un laboratoire du christianisme social dans sa version protestante. Les élus, pasteurs et instituteurs de la région étaient d’emblée qualifier pour devenir de superbes figures de la résistance civile et spirituelle. Les auteurs ont eu raison de mettre l’accent sur le christianisme social, lequel n’a pas été pour rien dans la préparation des esprits à l’accueil et au sauvetage des juifs.

Tout se passe comme si cette résistance non-violente gagnait tous les cœurs. Dans le concours apporté vaille que vaille aux autorités d’Occupation la gendarmerie se montre d’une inefficacité redoutable. Les Allemands eux-mêmes semblent gagnés par l’atmosphère de paix qui règne en ces lieux. Le major Schmähling, commandant de la Feldkommandantur au Puy, n’est pas un nazi virulent, loin de là. Il fait partie de ces Allemands contraints à la guerre et qui n’attendent rien d’autre que sa fin.

La qualité du travail de l’éditeur, les photographies nombreuses et la qualité des articles constituent un superbe témoignage en faveur des sauveteurs et de leurs protégés. Un livre qui rend honneur à l’homme.

Collectif, La Montagne refuge, Albin Michel, 2013, 379 pages, 25 €

 

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Actualités Recensions

Le bûcher des vaniteux 2

Broché: 336 pages
Editeur : ALBIN MICHEL (13 mars 2013)
Collection : ESSAIS DOC.
Langue : Français
ISBN-10: 2226245413
ISBN-13: 978-2226245410
Dimensions : 22,6 x 14,4 x 3,2 cm

 Le bûcher des vaniteux 2

Adeptes du politiquement correct, partisans d’un langage soporifique, incolore, inodore et sans saveur, tremblez ! Voici le mousquetaire Zemmour de retour avec le nouveau volume des rubriques qu’il distille deux fois par semaine sur les ondes d’une grande radio périphérique. Ce n’est peut-être pas de la grande littérature, mais c’est sacrément efficace. Il est vrai que faire passer des idées avec mordant requiert un style direct, un phrasé court… du punch quoi ! On ne fait pas de la grande radio avec un verbe ampoulé. Durant la Drôle de Guerre, Jean Giraudoux, écrivain de qualité s’il en est, s’y était cassé les dents : un bon littérateur peut être un piètre propagandiste ; on ne s’adresse pas au tout venant comme à une clique de gens cultivés et on ne fait pas passer des messages mordants quand on reste dans l’entre-soi. Eric Zemmour a bien compris la leçon. A chaque fois, un seul sujet et un sujet qui relève de l’actualité brûlante. Des phrases courtes, parfois sans verbe. Un style haché et tonique. Tout cela mis au service d’une pensée qui ne s’embarrasse pas du désir de faire plaisir à tout le monde. Rétif à la mondialisation, hostile à la technocratie européenne, consterné devant ce qu’il appelle la médiocrité du personnel politique, angoissé à l’idée de voir la France devenir un « agrégat de peuples désunis », hanté par le ravage du communautarisme, Zemmour frappe. Il cogne au grand plaisir des lecteurs. On sait aujourd’hui le résultat de ce travail de sape : Eric Zemmour est devenu un auteur réactionnaire en vue. S’il n’a pas le style empanaché de feu Léon Daudet, il n’en a pas non plus – Dieu merci ! – les outrances. Certains peuvent être agacés par le côté Cassandre du personnage, il n’empêche ! Alors que beaucoup de responsables politiques « ne voient le monde que par les lunettes de l’économique et du social », Zemmour considère le monde en exaltant le rôle de la politique, de la culture et de l’identité. « Serons-nous encore français demain ? » dénonce-t-il. Il vaut le coup, avec lui, de se poser la question.

Eric Zemmour, Le bûcher des vaniteux 2, Albin Michel, 2013, 357 pages, 20.90 €