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L’affaire Richard Millet : Critique de la bien-pensance

Broché: 265 pages
Editeur : Jacob Duvernet (31 octobre 2013)
Langue : Français
ISBN-10: 2847244697
ISBN-13: 978-2847244694
Dimensions : 21,8 x 14 x 2,4 cm

 L’affaire Richard Millet

En 2012, un coup de tonnerre retentissait dans le ciel de l’édition. Richard Millet, essayiste et romancier, membre éminent du comité de lecture de Gallimard, publiait un petit texte destiné à faire du bruit dans le landerneau germanopratin : Eloge littéraire d’Anders Breivik. Aussitôt le livre paru l’auteur était cloué au pilori par les tenants de la bien-pensance qui, à force de pétitions, obtenaient le renvoi de son auteur de chez Gallimard, le condamnant à la mort sociale. En publiant ce petit texte, Richard Millet ne donnait-il pas le sentiment de trouver quelque excuse à l’acte monstrueux du tueur norvégien d’Utoya, exécuteur de sang-froid de 80 quelque jeunes Norvégiens ? Sans approuver le crime – quand même ! -, Millet ne laissait-il pas supposer, avec un titre aussi ambigu, que le geste fou de Breivik s’accompagnait d’une sorte de beauté formelle, d’une esthétique dans l’horreur ? En fait, aux yeux de l’écrivain, cette tuerie constituait un aboutissement logique. L’Europe est tellement ouverte aux quatre vents qu’il ne faut pas s’étonner si certains, fragiles, se mettent en fureur devant ce qu’ils considèrent comme d’insupportables agressions. Anders Breivik constitue la pointe paroxystique d’une population qui refuse sa conversion « en petit-bourgeois métissé, mondialisé et multiculturel, inculte, social-démocrate ». (p. 14)

De tout cela, écrit Muriel de Renvergé, on aurait pu discuter. Le problème, c’est que l’affaire Richard Millet aura réveillé de mauvais instincts, ceux d’une classe médiatique prompte à s’en prendre violemment à ceux qui, d’une manière ou d’une autre, n’entrent pas dans les limites qu’elle a elle-même fixées. Que des écrivains pétitionnent pour obtenir la tête d’un des leurs, le priver de son emploi, voilà une chose que l’on croyait révolue depuis 1945. Dans le massacre d’Utoya, R. Millet ne voit rien d’autre qu’une « évolution mortifère de la société occidentale contemporaine ». Mais de cela on n’a pas le droit de parler. On condamne sans jamais aborder le fond du sujet. Pour Muriel de Renvergé, cette affaire est grave car elle tend à accroire l’idée que dans la France de ce début de siècle on ne lit plus, on ne débat plus, on met à terre. R. Millet aurait certainement souhaité qu’on puisse débattre d’un sujet de fond qui renvoie à l’avenir et à l’identité de l’Europe. Il ne critique pas l’immigré extra-européen et sa culture, c’est l’angoisse d’une Europe culturellement exsangue, hébétée par la consommation à outrance, qui le hante. L’horreur qu’il voit advenir, « c’est la conjonction d’une fatigue culturelle et de l’économie de marché. ». Voilà qui vaut débat !

Muriel de Renvergé, L’affaire Richard Millet : Critique de la bien-pensance, 2013, Editions Jacob-Duvernet, 266 pages, 20 €