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Grandeur et misère de l’Armée rouge

Poche : 400 pages
Editeur : Tempus Perrin (8 janvier 2015)
Collection : Tempus
Langue : Français
ISBN-10 : 2262049289
ISBN-13 : 978-2262049287
Dimensions : 17,7 x 1,8 x 10,8 cm

 Grandeur et misère de l’Armée rouge

La Seconde Guerre mondiale n’a pas fini de livrer des informations. Jean Lopez et Lasha Otkhmezuri ont interviewé douze vétérans de l’Armée rouge, douze anonymes qui avaient combattu entre 1941 et 1945 dans les rangs de l’instrument de combat qui avait définitivement rogné les ailes de la Wehrmacht. Car, quoiqu’on en dise, la guerre s’est bien moins gagnée sur le Front Ouest, avec le Débarquement du 6 juin 1944 que sur le terrible Front de l’Est, là où les Allemands avaient positionné l’essentiel et le meilleur de leurs forces. Mais, face à une Armée rouge aussi puissante que nombreuse, véritable hydre des temps modernes, la puissante machine de guerre nazie n’a pu vaincre. A la longue, les distances, les conditions climatiques, les erreurs stratégiques ont fini par user une armée d’invasion qui, en juin 1941, était entrée en territoire soviétique comme dans du beurre. Les témoignages livrés aux auteurs révèlent un fait observé depuis bien longtemps. Comme nous venons de le dire, ce sont des éléments précis et objectifs (l’immensité du pays, les rigueurs de l’hiver, le nombre des armes produites…) qui ont vaincu. Mais ces éléments auraient-ils suffi sans le concours de l’héroïsme du peuple soviétique ? En ce sens, la victoire finale de l’Armée rouge tient presque du miracle. Après la terrible répression que connaît l’Union Soviétique dans les années 1930, il n’était pas évident que les Soviétiques se lèvent en masse pour sauver un régime que beaucoup abhorraient. Mais voilà, l’appel au patriotisme a joué à plein. Le combat idéologique a vite cédé la place à la défense de la Rodina, la mère-patrie. Les anciens soldats qui donnent leur témoignage insistent : ils montaient au combat pour la défense de leur terre, pas pour sauver un régime honni. La guerre menée par les Soviétiques ne le fut pas à l’économie ; elle l’a été par le sang et la fureur d’un peuple qui avait le martyre dans les tripes. Comme le dit un des témoins interrogés : « Nous avons gagné cette guerre grâce à la brutalité que nous avons exercée contre notre propre nation. » La vie, en cette époque barbare, ne valait décidément pas chère.

 

Jean Lopez & Lasha Otkhmezuri, Grandeur et misère de l’Armée rouge, Tempus, 2014, 391 pages, 10 €

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Histoire Recensions

Joukov : L’homme qui a vaincu Hitler

Broché: 732 pages
Editeur : Librairie Académique Perrin (5 septembre 2013)
Langue : Français
ISBN-10: 2262039224
ISBN-13: 978-2262039226
Dimensions : 23,8 x 15,4 x 2,8 cm

 Joukov : L’homme qui a vaincu Hitler

Jean Lopez est à l’heure actuelle, en France, le spécialiste incontestable du front de l’Est, c’est-à-dire de l’implacable conflit qui opposa l’Allemagne hitlérienne à l’Urss de Staline. Féroce et impitoyable affrontement car c’est là, bien plus que sur les plages de Normandie, que s’est joué le sort de la guerre. Ce conflit géant qui a opposé des millions d’hommes et une masse colossale de matériel a constitué le théâtre d’opérations majeur du second conflit mondial. Car cette guerre fut vraiment terrible et dévastatrice : des millions de victimes, des destructions sans fin, une somme d’atrocités jamais dépassée au XX° siècle. C’est dans ce contexte apocalyptique que Georgi Joukov vit grandi son étoile. Rien ne prédisposait cet enfant de condition modeste et à la scolarité minimale de se voir confier les rênes de l’Armée Rouge, si ce n’est un amour de l’art guerrier vitaminé par un courage et une obstination de tous les instants. Au travers d’opérations militaires longuement disséquées, l’auteur ne nie pas les limites d’un homme orgueilleux et brutal. Néanmoins, il lui reconnaît les qualités qui lui ont permis de triompher d’adversaires multiples, et pas seulement l’Armée allemande. En effet, en plus d’avoir à mener des batailles contre cet adversaire redoutable qu’est la Wehrmacht, Joukov doit calculer avec la jalousie des autres grands chefs soviétiques et la duplicité d’un Staline qui n’hésite pas, afin de mieux assurer son pouvoir total, de faire jouer les rivalités.

La guerre à l’Est fut vraiment une guerre totale. Pas seulement par des batailles que l’expertise des auteurs décrit avec un grand luxe de précisions, mais aussi dans les rivalités qui déchiraient états-majors et chefs militaires. Avec un art consommé du « diviser pour régner », jusqu’au bout Staline a joué ses généraux les uns contre les autres. Il trouvait plaisir à les mettre en compétition car c’était, pensait-il, une assurance de poids contre le surgissement éventuel d’un nouveau Bonaparte, c’est-à-dire d’un soldat populaire suffisamment audacieux pour fomenter un coup d’Etat.

Pour apprécier pleinement le livre comme il convient, mieux vaut s’intéresser de près à l’histoire militaire. Ouvrage de passionné puisant aux meilleures sources, ce Joukov est ce que l’on fait de mieux en matière de biographie. Un somptueux et grandiose livre d’Histoire.

Jean Lopez & Lasha Otkhmezuri, Joukov, l’homme qui a vaincu Hitler, Perrin, 2013, 729 pages, 28 €