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Le royaume de Sobrarbe : Journal 2005

Broché : 673 pages
Editeur : Fayard (5 novembre 2008)
Collection : LITT.GENE.
Langue : Français
ISBN-10 : 2213629897
ISBN-13 : 978-2213629896
Dimensions : 23,5 x 4,8 x 15,5 cm

 Le royaume de Sobrarbe : Journal 2005

Parmi l’œuvre foisonnante de Renaud Camus, l’écriture du journal, année après année, constitue une singularité. En plus de vingt ans, l’essayiste aura noirci des milliers de pages traçant et retraçant le cours de sa vie. Celle-ci, semblable à celle de tous les auteurs du même genre, n’a rien de singulier et de palpitant, il faut bien le reconnaître. La vie de Renaud Camus zigzague entre travail harassant – il mène de front l’écriture de plusieurs livres -, difficultés financières, voyages, relations avec les éditeurs, etc. Ce sont là des marronniers que l’on retrouve régulièrement dans le Journal de l’auteur. Alors, pourquoi prendre du temps à la lecture de ces volumes qui atteignent généralement les 600 pages ? S’ils ne sont guère passionnants, comment justifier que le lecteur y consacre autant de temps ? Deux raisons me paraissent justifier l’investissement. D’une part, la qualité du style, jamais prise en défaut. Renaud Camus, auteur des Répertoire des délicatesses du français contemporains est l’un de nos meilleurs stylistes et cela n’a pas de prix. La seconde raison de l’attachement à ce journal est que l’auteur, qui n’est pas à première vue un être atrabilaire, exhale son désamour du monde contemporain, univers qui a largué les amarres avec son histoire, sa culture et son être profond. Chez Camus, cette méfiance extrême à l’égard du monde moderne se lit à travers la constance des humeurs qui sourdent chez lui devant l’enlaidissement de nos paysages et la nocence, ce travers qu’il a constaté chez beaucoup et qui consiste à vivre comme si les autres n’existaient pas. La vacuité de l’époque, le culte de l’éphémère, ce constant bruit de fond d’un temps qui invite à la consommation et au divertissement généralisé constituent, pour l’auteur du Château de Sobrarbe, les éléments clés de la « décivilisation ».

 

Renaud Camus, Le royaume de Sobrarbe : Journal 2005, Fayard, 2008, 675 pages, 36€

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Histoire Recensions

14-18 La première guerre mondiale

Relié : 605 pages
Editeur : Acropole Belfond (6 octobre 2011)
Langue : Français
ISBN-10: 2735703592
ISBN-13: 978-2735703593
Dimensions : 29,2 x 21 x 3,8 cm

 14-18 La première guerre mondiale

A l’orée du centenaire de la grande boucherie de 1914-1918, les publications de tout acabit ne vont pas tarder à envahir librairies et kiosques. Certains, dont Pierre Vallaud, auteur de cette Première Guerre mondiale, n’ont pas attendu la date phare de 2014 pour livrer leur version d’un conflit qui a tant compté pour l’histoire du XX° siècle. Pour beaucoup en effet, ce siècle commence le 2 août 1914 pour s’achever en 1989, chute du Mur de Berlin. Soixante-quinze ans pour un siècle, cela peut sembler court mais, à y regarder de plus près, la densité des événements est telle que l’on peut, pour une fois, mettre de côté les rigidités chronologiques.

Sans être révolutionnaire, le livre de Pierre Vallaud fournit une magnifique synthèse de ce conflit dantesque. Le lecteur sera indulgent sur quelques défauts mineurs. On pardonnera volontiers la désinvolture avec laquelle l’auteur traite la grande bataille navale du Jutland tant les qualités générales de l’ouvrage sautent aux yeux. Parmi celles-ci, retenons-en trois. Le texte est agrémenté de plusieurs centaines de photos et de dessins inédits ou rarement publiés. Pour la première fois dans l’histoire des guerres l’utilisation de la photo permettait de rendre encore plus proche la vie et la souffrance du soldat. Ce que la Guerre de Sécession avait permis d’entrevoir trouvait ici un couronnement. Les vues de ces cadavres rassemblés après la bataille disent plus de l’ampleur du carnage que tous les savants traités. L’auteur a eu également l’excellente idée d’enrichir l’ouvrage de lettres envoyées par les combattants à leurs proches. Il en ressort une émotion palpable, des moments d’humanité saisis sur le vif ; par exemple l’état d’esprit du soldat qui attend la permission désirée ou de celui qui s’apprête à monter en ligne. L’ouvrage est enfin remarquable par la place qu’il donne à des théâtres d’opération dont une certaine historiographie a minoré l’importance : Balkans, Proche-Orient, Caucase… Il y a même une photographie représentant des Tahitiens, encadrés de soldats français, prêts à faire le coup de feu contre quelque navire corsaire allemand ! Par son ampleur même, cette guerre fut vraiment un conflit mondial. L’auteur a su saisir la dimension planétaire d’un conflit qui n’avait pas de précédent.

S’il ne s’agit pas du livre le plus fouillé relatif à la Première Guerre mondiale, le livre de Pierre Vallaud devrait figurer en bonne place parmi les livres qu’il faut avoir lu sur cette période. Une synthèse agréable, simple sans jamais tomber dans le simplisme.

 

Pierre Vallaud, 14-18 La première guerre mondiale, Acropole, 2008, 605 pages, 36 €