Catégories
Recensions Religion

La belle mort de l’athéisme moderne

Broché: 168 pages
Editeur : PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE – PUF; Édition : 1 (11 janvier 2012)
Collection : Quadrige Essais Débats
Langue : Français
ISBN-10: 2130591655
ISBN-13: 978-2130591658
Dimensions : 18,8 x 12,4 x 1,4 cm

 La belle mort de l’athéisme moderne

C’est un livre remarquable que vient de publier le philosophe Philippe Nemo, auteur de La belle mort de l’athéisme moderne. Un petit livre qui, en sept courts chapitres, s’avère d’une extraordinaire densité. Cet ouvrage est à lire avec la plus grande attention car toutes les pages sont importantes, à commencer par la première page de la préface dans laquelle P. Nemo explique sa méthode de travail. Il postule en effet que le christianisme est vrai. Attention, cela ne signifie pas qu’il n’existe pas de vérité ailleurs que dans le christianisme, mais pour l’auteur « c’est le seul à receler la vérité qui importe le plus à la vie humaine. » (p. 10) L’ouvrage reprend des conférences et articles parus en France et en Italie. D’habitude ce mélange produit davantage de patchworks que de chefs-d’œuvre, or, ici – heureuse surprise ! – l’assemblage ne souffre pas de manque d’unité. Dans un premier chapitre, P. Nemo postule la fin de l’athéisme post-moderne, mort de sa belle mort, mort parce que, « finalement il n’a rien de bon à offrir à l’humanité » (p. 11). Suivant René Girard, l’auteur estime que la Bible et l’Evangile « seuls tiennent, dans le monde d’aujourd’hui, un discours sensé sur le bien et le mal, sur la vie et la mort. » (p. 26) L’analyse du Livre de Job permet d’entrevoir la puissante originalité du judéo-christianisme, révolution éthique et révolution eschatologique. Dans les chapitres suivants l’auteur montre à quel point la Bible a changé le monde « en mettant en relief la responsabilité individuelle, en donnant comme mot d’ordre l’amour du prochain… ». Ce faisant, la Bible dit bien plus que ce qu’affirme la « raison sécularisée » qui, elle, ne dit rien de la vie et de la mort, du bien et du mal.

Enfin c’est le christianisme qui a promu le libéralisme. L’affirmation ne se réduit pas au seul libéralisme économique ; elle met l’accent sur la liberté que possède l’homme de prendre son destin en main, d’assumer son avenir. Seule la liberté peut traduire de façon significative la charité en acte. Revenant sur l’histoire des racines chrétiennes de l’Europe et leur dénégation, l’auteur déplore le manque de courage des responsables politiques européens qui, à force de vouloir tout niveler, oublient ce que l’Europe, en tant que construction politique et économique, doit au christianisme. Ignorance ou lâcheté ? Les deux sans doute.

Un livre de conviction et de raison, en tous points passionnant !

Philippe Nemo, La belle mort de l’athéisme moderne, Puf, 2012, 149 pages, 15 €

Catégories
Recensions Religion

Charles le Catholique : De Gaulle et l’Eglise

Broché: 389 pages
Editeur : Plon (3 novembre 2011)
Langue : Français
ISBN-10: 2259212573
ISBN-13: 978-2259212571
Dimensions : 23,8 x 15,4 x 3,6 cm

 Charles le Catholique

Le livre de Gérard Bardy, Charles le Catholique, n’est pas le premier à mettre en scène la foi du Général de Gaulle. Michel Brisacier l’avait fait en son temps avec un livre intitulé La foi du Général ; de même qu’Alain Larcan avec De Gaulle inventaire. La culture, l’esprit, la foi. Bien d’autres ont été écrits sur ce thème : les convictions profondes qui animaient ce « souverain » (J. Lacouture). Cette abondance n’est pas le fruit du hasard. La foi du Général de Gaulle est  une sorte de foi du charbonnier, empreinte de piété et de référence constante à l’Ancien Testament et à l’Evangile. Sa correspondance privée est émaillée de citations bibliques. Souvent il fait référence à l’abnégation, à l’esprit de sacrifice, à l’héroïsme… Ce n’est pas le train-train qui l’intéresse, mais les vertus qui suscitent l’espérance. Tout, dans son attitude, atteste l’héritage catholique, familial d’abord, scolaire ensuite : élevé dans une famille très croyante le jeune Charles de Gaulle avait fait ses études chez les jésuites ; il en a été durablement marqué. « Son acceptation des sacrifices,  […]  son souci permanent de la dignité de l’homme, son respect de la morale tant privée que publique, le caractère sacré qu’il donne à la famille, sa relation à la souffrance, au handicap et à l’argent, ses manifestations de charité chrétienne faites avec une extrême discrétion » (p. 12) tout chez De Gaulle indique la prégnance d’une foi catholique indissociable des grandes heures de l’histoire de France. Toute laïque qu’elle est, la France demeure toujours dans son esprit « la fille aînée de l’Eglise ».

Toute sa vie De Gaulle manifesta une foi profonde. S’il savait, en tant que président d’une République laïque, marquer la distinction entre ce qui ressort du comportement public du privé, il était enclin à avoir de la France une image puisée dans la littérature chrétienne. Dans ses discours et ses allocutions les mots à connotation religieuse sont légion. En privé, sous une grande pudeur, le Général de Gaulle manifestait une grande piété. Devant la grandeur divine, il n’hésite pas à se reconnaître humble pécheur.

Gérard Bardy nous gratifie d’un ouvrage remarquable, autant par la facilité de lecture que par la sûreté de l’information. De Gaulle fut sa vie entière imprégné des valeurs classiques du catholicisme. Finalement, tant par son style que par ses croyances, De Gaulle apparaît comme un homme du XIX° siècle, un siècle qui, contrairement au mot féroce de Léon Daudet, fut loin d’être stupide

Gérard Bardy, Charles le Catholique : De Gaulle et l’Eglise, Plon, 2011, 385 pages, 22 €

Catégories
Recensions Religion

Manuel de théologie fondamentale

Broché: 874 pages
Editeur : Cerf; Édition : Nouvelle (7 novembre 1990)
Collection : Cogitatio Fidei
Langue : Français
ISBN-10: 2204031194
ISBN-13: 978-2204031196
Dimensions : 21,4 x 13,2 x 4,4 cm

 Manuel de théologie fondamentale

Il n’y a pas qu’en économie, dans le dialogue social ou en sport que les Allemands sont bien placés. La production livresque germanique est également digne du plus haut intérêt. Au minimum, elle indique l’excellence de la patrie de Goethe dans le domaine intellectuel. Depuis environ deux siècles, dans un certain nombre de sciences les Allemands sont à la pointe. En matière d’exégèse biblique et de recherches théologiques, ils sont parmi les meilleurs, si ce n’est les premiers. Au XIX° siècle, ils avaient Strauss et Harnack. Au XX° siècle, ils ont eu Rahner, Ratzinger… ainsi que toute une pléiade de théologiens, protestants et catholiques, de très haut niveau. Tant en matière d’exégèse, de droit canonique, de liturgie ou de dogmatique, la production allemande compte parmi ce qui se fait de mieux. Le jésuite Hans Waldenfels fait partie de ces théologiens. Son Manuel de théologie fondamentale – un pavé ! – constitue un travail très longue haleine. Le résultat, sous forme de synthèse, est impressionnant. En cinq parties d’égale longueur (la théologie et son contexte, Dieu, le Christ, l’Eglise, l’Evangile), H. Waldenfels donne l’essentiel de ce qu’il y a lieu de savoir une fois que l’on a abordé cet immense continent qu’est la théologie, y compris la pensée qui entend la réfuter : l’athéisme. La construction de l’ouvrage est typique du produit de l’Université allemande : toutes les informations données sont hiérarchisées, systématisées. Par exemple, le chapitre consacré à Jésus s’ouvre par une partie intitulée « Points de vue ». Comme il s’agit d’un manuel, ne sont pas exposés là les points de vue de l’auteur sur le Christ. Non, ce qui a intéressé l’auteur c’était de considérer ce qui était dit sur le Christ, vu d’en haut, d’en bas, de l’intérieur et de l’extérieur, ceci afin de ne rien oublier de ce que l’apologie ou la critique aurait pu produire sur le sujet.

 

La première édition de cet ouvrage datant de plus de vingt ans, on pourra trouver les sources quelque peu datées, c’est sans doute regrettable mais cette imperfection a le mérite de replacer l’ouvrage dans une époque ; il ne faut jamais oublier que la théologie est une discipline vivante. Evidemment, la lecture d’une telle masse est aride ; elle exige la pleine concentration du lecteur. Pourtant, une fois cet écueil dépassé, demeure l’ineffable plaisir d’avoir vogué du côté des cimes.

Hans Waldenfels, Manuel de théologie fondamentale, Le Cerf, 2010, 868 pages, 47.50 €