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Les déshérités ou l’urgence de transmettre

Broché : 207 pages
Editeur : Plon (28 août 2014)
Langue : Français
ISBN-10 : 2259223435
ISBN-13 : 978-2259223430
Dimensions : 20,1 x 1,9 x 13,1 cm

 Les déshérités ou l’urgence de transmettre

La culture et, avec elle, ce qu’elle suppose de transmission et d’accomplissement, est-elle en train de disparaître ? C’est par une anecdote que F.-X. Bellamy commence son livre, cette soirée de 2011 où, à l’Opéra de Rome, le chef d’orchestre Ricardo Muti prend le public à témoin. Il a honte, avoue-t-il, de penser que l’Italie contemporaine est en train de tuer la culture sur laquelle l’histoire du pays est bâtie. Plus près de nous, d’autres chiffres nous arrivent, cinglants, à vous ficher un coup de poing à l’estomac : de plus en plus de jeunes sont incapables de trouver le sens d’un texte et la simple lecture devient pour eux un supplice. Comment se fait-il qu’au pays de l’école gratuite et obligatoire la transmission du savoir s’opère dans des conditions de plus en plus malcommodes ? Dans la première partie de cet ouvrage vigoureux et plein de panache, l’auteur rappelle que les programmes jadis défendus par Descartes, Rousseau et Bourdieu sont en train de magnifiquement s’accomplir. Eux qui prétendaient que la culture est discriminatoire, que l’enseignant sert à la reproduction des élites et que l’éducation est porteuse de violence ; eux qui ont bénéficié de la transmission et d’un enseignement de qualité en sont arrivés à dénier ce droit aux jeunes. Le résultat de ces fariboles ne s’est pas fait attendre : inculture à tous les niveaux, abrutissement devant les écrans et la télé-réalité, indistinction, culte de l’ego, etc. Le jugement de F.-X. Bellamy est sans appel : « La crise de la culture est le résultat d’un travail réfléchi, durable, explicite. » (p. 25). Le problème c’est que – mais nous sommes trop affairés pour le voir – la culture nous est essentielle en ce sens qu’elle augmente ce que nous sommes. Elle ne constitue pas un accessoire pour une élite privilégiée ; elle est constitutive de l’être humain dans ce qu’il a de plus nécessaire. Aussi pouvons-nous être certains que la disparition de la culture ou, au minimum, son confinement dans quelques strates de la société, risque de nous conduire à l’ensauvagement, à l’indistinction et « aux radicalités les plus délirantes » (p. 206). Il est vital de voir que la culture est ce à quoi on reconnaît d’abord une civilisation. Pour ce faire, le rôle de la transmission est essentiel : elle seule peut stopper la déconstruction en direction de laquelle la société toute entière est entraînée. Un livre vital et nécessaire.

 

François-Xavier Bellamy, Les déshérités, Plon, 2014, 207 pages, 17€